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27 février 2009 5 27 /02 /février /2009 19:03

Pourquoi créer des oeuvres d'art?


Tout le monde le sait : l'art ne sert à rien. Dans un monde où tout se justifie par son utilité, on peut alors se demander pourquoi l'on continue à créer. Certains répondront que c'est parce qu'il y a un marché : l'oeuvre est ici réduite à une marchandise dont la valeur est purement arbitraire puisqu'elle dépendrait au mieux au goût de quelques personnes très riches, au pire d'un mouvement éphémère de mode. L'oeuvre d'art est alors bien peu de chose.

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27 février 2009 5 27 /02 /février /2009 18:54
Chacun de nous a sa manière d\'aimer et de hair,et cet amour,cette haine reflètent sa personnalité toute entière.Cependant le langage désigne ces états par les mêmes mots chez tous les hommes;aussi n\'a-t-il pu fixer que l\'aspect objectif et impersonnel de l\'amour,de la haine,et des mille sentiments qui agitent l\'âme.Mais de même qu\'on pourra intercaler indéfiniement des points entre deux positions d\'un mobile sans jamais combler l\'espace parcouru,ainsi,par cela seul que nous parlons,par cela seul que nous associons des idées les unes aux autres et que ces idées se juxtaposent au lieu de se pénétrer,nous échouons à traduire entièrement ce que notre âme ressent:la pensée demeure incommensurable avec le langage.
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26 février 2009 4 26 /02 /février /2009 20:26

L'Individu, Réflexions sur la philosophie du sujet, Alain Renaut, compte rendu de lecture

INTRODUCTION

Alain Renaut commence son ouvrage par un rappel de la longue histoire de la notion d’individu. Il retient deux exemples de cette histoire :
1. Dans l’Antiquité, Cicéron a donné le nom latin d’individuum aux corpuscules insécables qui composent dans la théorie de Démocrite et des épicuriens tous les corps qui constituent l’univers.
2. Au Moyen Age, cette notion a joué un grand rôle dans la querelle des universaux : pour Guillaume d’Occam notamment, il n’existe que des individus et l’universel n’a qu’une existence purement sémiotique et verbale.

Cependant il faut attendre la période moderne pour que la notion prenne tout son importance : seule la conception moderne du monde permet une pleine valorisation de l’individu. « (…) Sous bien des rapports, c’est à travers l’affirmation de l’individu comme principe et comme valeur (si l’on veut : l’individualisme) que le dispositif culturel, intellectuel et philosophique de la modernité se peut à la fois se caractériser dans sa plus certaine originalité et interroger dans quelques-unes de ses plus redoutables énigmes ». La raison essentielle en est l’appréhension spécifique de la liberté qui a émergé à la Renaissance et s’est développée avec le cartésianisme.

1. L’auteur par de l’idée qu’avec la modernité se met en place une nouvelle conception de la liberté. Hegel par exemple souligne bien la différence de nature entre la liberté des anciens et celle des modernes. Certes certains citoyens possédaient une réelle liberté : cette dernière se définissait de façon purement juridique. Mais « l’infinie exigence de la subjectivité, de l’autonomie de l’esprit en soi était inconnue aux Athéniens ». Dans le même sens, Heidegger estime que les modernes accèdent à une « nouvelle liberté » qui s’inscrit dans le « déploiement de l’Être en tant que subjectivité » et est liée à la « législation autonome de l’humanité ». « Dans la nouvelle liberté, l’humanité se veut assurée du déploiement autonome de toutes ses facultés pour exercer sa domination sur la Terre entière. »

Cette mise en relation et la prétention à une liberté conçue en terme d’autonomie sera interrogée de 2 façons :
- dans quelle mesure s’agit-il ici d’une « nouvelle liberté » qui engagerait une autre représentation de l’homme? Quelle facture s’est réalisée avec la conception précédente?
-est-il pertinent d’identifier l’autonomie à la « liberté des Modernes« ?

2. Naissance de l’humanisme et exigence d’autonomie

L’origine du terme d’autonomie est grecque. On le trouve chez Démocrite, Plutarque Sophocle Isocrate. Hérodote, Xénophon et Démosthène vont même jusqu’à confondre le terme de liberté (eleuthéria) et celui d’autonomie pour désigner la situation d’une cité qui ne serait pas soumise à une domination extérieure. Est-ce cependant suffisant pour contester la thèse classique selon laquelle est libre celui qui est doté des prérogatives du citoyen?
Certains au contraire ont pu concevoir que l’idée grecque d’autonomie s’appliquait non seulement à le cité mais aussi à des personnes, si bien que la problématique de la liberté de l’individu serait contenu dans la conception antique de la liberté politique. La logique interne de la culture grecque conduirait ainsi à la réalisation du processus démocratique. Il es facile de céder à la tentation de cette orientation continuiste lorsque l’on identifie « la manière dont les cités grecques ne cessaient de « remettre en question leur institution » et de « modifier les règles » de la vie en commun à l’ »émergence de l’autonomie »(Castoriadis, Débat, jv-mars 86) .» La question consiste là savoir s’il est question d’une redécouverte du sens authentique de la notion de liberté ou s’il s’agit simplement d’une illusion rétrospective. La tentative de l’auteur sera de « souligner dans quelle mesure les conditions précises exigées par la valorisation moderne de l’autonomie étaient encore fort loin d’être toutes remplies dans le cadre de la culture et de la philosophie grecques ».
L’auteur souligne d’abord le présupposé de la conception et de la valorisation de l’humanité comme « capacité d’autonomie, qui vont être constitutives de l’humanisme moderne et conduire (…) à l’affirmation de l’individu comme principe. La modernité se définit intrinsèquement par la manière dont l’homme se constitue comme « source de ses représentations et de ses actes, comme leur fondement (subjectum, sujet) ou encore comme leur auteur ». Ce n’est plus une instance extérieure (Dieu, nature des choses) qui impose ses normes à l’homme moderne qui au contraire fonde cer dernières à partir de sa raison et de sa volonté.
Par conséquent :
-le droit naturel moderne n’est plus de nature objective(trouvé dans un ordre immanent ou transcendant du monde) mais subjective(posé et défini par la raison ou volonté humaine)
-les sociétés modernes se trouvent auto-instituées et recourent pour ce faire au schéma contractualise. « l’homme n’a d’autre législateur que lui-même » Sartre.
Or la compréhension de la liberté comme autonomie n’est pas concevable dans le contexte qui a permis aux Grecs d’appréhender leur liberté : « le droit que possède les citoyens (…) d’exercer collectivement une part de la souveraineté se fonde en effet ici, non dans la reconnaissance du principe d’autonomie (…), mais dans l’organisation finalisée d’une nature au sein de laquelle « certains sont faits pour commander et d’autres pour obéir » »cf Aristote. Ce n’est donc pas la volonté humaine qui fonde la souveraineté. La volonté n’est jamais conçue comme capable de s’auto-déterminer.
Qui plus est, pour que le pouvoir de choix de la liberté des Modernes trouve une signification, il faut la concevoir dans le cadre d’un monde contingent ou même dans celui d’in monde en désordre. Or la cosmologie grecque se place dans un monde (« cosmo s ») régi par un ordre intangible. P. Aubenque : « la liberté de l’homme n’a pas partie liée à la contingence, mais au contraire elle s’y oppose »( La Prudence chez Aristote). Aristote compare en effet les hommes libres à des astres parce qu’ils n’agissent jamais au hasard et que leurs actions sont réglés. Par opposition, les actions des esclaves « sont rarement ordonnées au bien de l’ensemble, mais sont le plus souvent laissés au hasard. En d’autres termes, « ce sont les esclaves qui sont libres au sens moderne du terme, parce qu’ils ne savent pas ce qu’ils font, alors que la liberté de l’homme grecque et sa perfection se mesurent à la détermination plus ou moins grande de ses actions (Aubenque) ».
On voit donc clairement que la liberté grecque ne se conçoit pas selon le principe de l'autonomie mais bien au contraire selon celui de l'hétéronomie : quand bien même l'homme serait capable de créer un ordre nouveau, il faudrait que cette nouveauté puisse s'inscrire dans le cadre d'un monde appréhendé sous le mode d'un cosmos aux règles intangibles.

3. Autonomie et subjectivité (1° forme d'homogénéisation de la modernité)

Heidegger inscrit sous l'exigence d'autonomie le déroulement de la modernité : la philosophie moderne constitue pour lui une « métaphysique de la subjectivité qui s'est déployée en 4 étapes.

1. Descartes fait apparaître l'idée que la nature n'obéit pas à des forces obscures et invisibles, qu'elle est constituée d'une matière neutre, « maîtrisable par la raison (tout est susceptible d'être connu) et par la volonté (la totalité du réel est utilisable par l'homme visant la réalisation de ses propres fins) ». Cette vision anthropocentrique du monde constituerait l'essence de l'humanisme « pour laquelle tout devient moyen en vue de l'accomplissement de l'homme ».

3. Les Lumières réalisent une rupture avec l'idée cartésienne d'une physique a priori et impose à la rationalité scientifique une reconnaissance de ses limites, mais « la science continue d'apparaître comme un instrument neutre, mis au service des fins qui la dépassent et à partir desquels elle trouve sa valeur, qu'il s'agisse de l'émancipation ou du bonheur de l'humanité ».

4. Kant, à partir de la critique des morales du bonheur, effectue un virage décisif : la volonté morale se définit alors comme pure autonomie; à la fois agent et principe de la moralité,  elle se constitue comme objet d'elle-même et ne veut rien d'autre qu'elle-même. c'est elle qui pose la loi à laquelle elle accepte de se soumettre.

5. Nietzsche va alors radicaliser cette position en posant  la "volonté de puissance" par laquelle la volonté se veut elle-même. "le devenir-monde de cette figure ultime de l'humanisme moderne, par quoi s'achève le destin de l'idée d'autonomie, serait ainsi la technique, ou, si l'on préfère, cette raison purement instrumentale qui ne pose plus la question des fins et fait de la volonté (ou de la puissance) une fin en soi."

  « Le sens d'une telle déconstruction est limpide : la raison de Descartes et des Lumières n'aurait fait que conduire logiquement, par un mouvement de radicalisation, à cette volonté de la volonté où l'affirmation de l'homme comme sujet (fondement) trouverait son plus parfait accomplissement ; en ce sens, l'explication kantienne du principe d'autonomie ne ferait que s'inscrire au sein d'un unique et fatal parcours, s'achevant par l'essor triomphal d'une technoscience préoccupé exclusivement du renforcement continuel de son pouvoir, quel qu'en soi le prix. Force serait alors de convenir que c'est l'essence même du moderne, telle que l'exprime la vocationdu sujet à l'autonomie, qui se trouverait en jeu jusque dans les formes les plus aberrantes de la technicisation du monde : loin que l'on puisse dans ces conditions jouer une figure de la modernité contre une autre, tout conduirait bien plutôt au sacrifice global de la modernité et de ses valeurs, à commencer par celui de cette valeur de l'autonomie qui en exprime le mieux l'essence ».



4. Le paradigme individualiste (2° forme d'homogénéisation de la modernité)

La logique de la modernité a été interprétée de 2 façons :

  • comme une aliénation de l'individu à l'égard du collectif et du mode de production capitaliste

  • comme une émancipation de l'individu « vis-a-vis du poids des traditions et des hiérarchies naturelles »

La 1° interprétation s'est effondrée avec l'idéologie communiste. La seconde consiste à interpréter « l'histoire de la modernité, non plus à partir du développement du mode de production capitaliste, mais selon une dynamique d'émancipation de l'individu vis-à-vis du pods des traditions et des hiérarchies naturelles ». Cette interprétation consiste à « opposer aux sociétés traditionnelles celles où l'individu n'entend plus être soumis à nul autre que lui-même ».

La seconde a les faveur du présent. Cependant l'auteur reste méfiant à son égard : « il ma faut avouer que n'a cessé de croître en moi (…) l'inquiétude que [le paradigme individualiste] ne pût contribuer (…) à produire un nouvel aveuglement sur la complexité du moderne ». En effet, les analyses les plus récentes qui privilégient cette interprétation ont tendance à confondre les notios d'autonomie et d'indépendance, d'un côté, et celles de sujet et d'individu de l'autre. Ces différenciations ont certes une portée philosophique, mais elles ont surtout une portée pratique et politique. « Il [faut] reposer la question de savoir ce qu'il peut et doit en être d'une culture authentiquement démocratique (moderne). » Il s'agit ici de déterminer les principes et les valeurs d'une culture de ce type: comment le rapport de l'homme avec lui-même peut être producteur de normes et de lois?

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21 février 2009 6 21 /02 /février /2009 21:40

Une morale non fondée en raison, celle qui consiste à « faire la morale aux gens », ne peut avoir d'action, parce qu'elle ne donne pas de motifs. D'autre part, une morale qui en donne ne peut agir, qu'en se servant de l'égoïsme : or, ce qui sort d'une pareille source n'a aucune valeur morale. D'où il suit qu'on ne peut attendre de la morale, ni en général de la connaissance abstraite, la formation d'aucune vertu authentique; elle ne peut naître que de l'intuition, qui reconnaît en un étranger le même être qui réside en nous.

En effet, la vertu résulte assurément de la connaissance ; seulement ce n'est pas de la connaissance abstraite, de celle qui se communique par des mots. Sans quoi, la vertu pourrait s'enseigner […]
Pour créer ce qui fait l'essence propre et intime de la vertu, le concept est impuissant, de même qu'il l'est dans l'art. […]

Qu'est-ce donc qui peut nous inspirer de faire de bonnes actions, des actes de douceur? la connaissance de la souffrance d’autrui : nous la devinons d'après les nôtres, et nous l'égalons à celles-ci. On le voit donc, la pure douceur (agapè, caritas) est, par nature même, de la pitié ; seulement la souffrance qu'elle s'efforce d'adoucir peut être tantôt grande et tantôt petite, elle peut n'être qu'un simple souhait déçu. Nous n'hésiterons donc pas à contredire ici Kant : il ne veut reconnaître de bonté vraie et de vertu que celles qui naissent de la pensée abstraite, et plus exactement des concepts du devoir et de l'impératif catégorique ; quant à la pitié qu'on ressent pour un être faible, il ne voit pas là une vertu ; eh bien, nous contredirons nettement Kant, et nous dirons : le concept seul est aussi impuissant à produire la vertu vraie qu'à créer le beau véritable ; toute douceur sincère et pure est pitié, et toute douceur qui n'est pas pitié n'est qu'amour de soi. Qu'est-ce que l'amour, éros? de l'amour de soi. Qu'est-ce que la douceur, agapè? de la pitié. Certes les deux se mélangent souvent. […] Dans le langage de la pure tendresse, le ton, les paroles, les caresses, sont tout à fait en harmonie avec ceux qui expriment la pitié; et pour le dire en passant, en italien la pitié et la tendresse pure ont le même nom, pitié.
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19 février 2009 4 19 /02 /février /2009 21:36

Le citoyen a une tendance de plus en plus marquée à s’en remettre à l’Etat [E] dès qu’un problème se pose à lui. D’un autre côté, ceux la-même qui en appelle sans cesse à lui pour servir leur intérêts particuliers sont les premiers à en critiquer les contraintes. Ainsi, on veut des services publics parfaitement efficaces, voire l’augmentation du nombre de ces services, mais en même temps, on répugne à en payer le pris. En d’autres termes, on attd tt de l’E : le beurre sans l’argent du beurre. La contradiction est flagrante. Plus profondément, on ne peut que remarquer que les E qui se sont donné pour mission de tout donner à leurs citoyens, s’ils n’étaient pas de facto des dictatures, ont vite tourner aux pires excès. Tt at de l’E ne conduit-il pas à un e impasse ? Ne vaut-il pas mieux affirmer la responsabilité des individus et reconnaître l’action de la société civile ?


  1. Attendre tout de l'E : le plus grand des dangers.


  1.  
    1. Comment l’individu peut-il penser qu'il peut tt at de l’E ? Ce dernier est sensé -dans les démocratie du moins – incarner la volonté populaire. Le peuple croit donc qu'il agit dans son intérêt et pense légitime d'attendre tout de lui.

    2. La société civile [s c] doit-elle tout at de l’E ? C'est oublier qu'un pays n'est pas seulement l'agrégat d'ind, mais qu'il est aussi constitué de groupes plus ou moins bien organisés qui constituent la s c.

    3. Que gagne-t-on alors à s’en remettre pour tout à l’E ?

      • une certaine sécurité : l'E est là pour protéger ind et groupes officiellement reconnus et pour permettre à la pluralité des gr et ind de vivre dans le calme et la tranquillité, sinon en bonne intelligenge,

      • au détriment de la liberté [l]. Mais on peut se poser des questions en ce qui concerne la l : quelle marge de manoeuvre va alors laisser l'E s'il s'attache à répondre à tout les besoins et désirs des citoyens, notamment en ce qui concerne ce qui touche le sphère privé. Et l'on sait à quelles impasses conduisent les volontés étatiques de faire le bonheur des citoyens et l'on connaît les horreurs commises au nom de la constitution d'un homme nouveau.


  1. A qui sert l’E ? Ou qui peut attendre qqc de l’E ?


  1.  
    1. E, incarnation de la souveraineté populaire? On peut facilement remettre en cause sinon le principe, du moins la réalité de cette incarnation. Nombreuses sont les critiques montrant que derrière l'appareil d'E s'exerce des puissances (économiques par ex. cf. Marx ou idéologiques cf. rôle des religions).

    2. L'E ne serait alors qu'instrument de pouvoir au service, non du peuple, mais des castes qui occuperaient sa tête (cf Bourdieu). Dans ces circonstances, on n e pourrait at de l'E qu'une chose : qu'il défende les intérêts de ces castes, dont le principal intérêt serait de rester au pouvoir. Cf. Machiavel

    3. E des partis, E partisan. Il faut cependant établir une distinction d'importance : certains E acceptent que le povoir soit sensible aux multiples pressions qui s'exercent dans la collectivité pour que la réglementation prenne en considération une catégorie particulière d'intérêts ou s'inspire d'une finalité plus globale mais ne se confondant pas avec le bien commun (= l'E des partis); d'autres E excluent cette actin des partis et le pouvoir s'inscrit une fois pour toute dans une idéologie dont les termes ne sont que très rarement remis en cause, idéologie exprimée et protégée par une institution intangible (parti unique, chef inamovible, religion, classe sociale...). Dans ce second cas, rien ne peut être attendu de l'E, sinon la stabilité : il n'est plus que l'alibi du plus puissant, et son meilleur instrument de domination.


  1. Tout vient-il de l’E ?

a. L’Etat est un cadre indispensable à la vie collective. Selon les théories du contrat social, il est l’instance qui permet de passer de l’état de guerre permanent entre individus à une vie sociale stable. Prenant en charge le monopole de la violence légitime, il substitue le règne du droit à celui de la loi du plus fort (à rapprocher du Léviathan de Hobbes).

b.Les fonctions régaliennes de l’Etat rassemblent les différents rôles qu’il doit assumer pour rendre une vie collective possible :

  • la sécurité du territoire, par la constitution d’une armée

  • la sûreté de ses habitants, par la constitution d’une police

  • l’édification et l’imposition du droit, à travers un ensemble de législations stables

  • la mise à disposition d’une monnaie commune à tous les agents économiques

c. Les fonctions régaliennes définissent l’Etat minimum, qui constitue généralement une base consensuelle pour les différentes théories de politique économique. En effet, la possibilité d’une vie collective conditionne la possibilité de toute vie économique.
(source : PISE). On peut alors élargir le propos et poser que l’E est la condition de la vie de chaque individu, lequel ne recevrait rien, ou pas grand chose (cf ; état de nature) sans la présence de cette structure qui lui paraît souvent très contraigante.


Ccl : rôle de l'E

  1.  
    1. la sécurité extérieure et intérieure

    2. la régulation des conflits par le droit, arbitrage au sein de la société, répartition pacifiée des pouvoirs

    3. E, simple structure administrative réduite à ses fonctions régaliennes

Que l'E assume ses fonctions, voilà ce que le citoyen peut légitimement attendre de lui.

Et que le premier laisse assez d'espace au second pour que ce dernier puisse trouver son bonheur et exercer librement tout ses talents, voilà qui ne pourra que profiter à l'E.

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19 février 2009 4 19 /02 /février /2009 10:25
L’individu au sens philosophique. (en construction)

I. Le principe d’individuation

a. la multiplicité numérique est due

1.à la matière
- Platon
La physique générale s’efforce d’expliquer la nature des corps; or les choses sensibles soumises au mouvement perpétuel exigent un double principe : l’un infini, i. e. indéterminé; l’autre fini et source de détermination. De leur union naît l’ordre du monde.
a. le principe infini : la matière
La matière ou réceptacle est un principe absolument dépouillé de tout détermination, et en ce sens infini. Elle est par conséquent, de soi, privée de tout bien, de tout ordre ou perfection comme de toute stabilité : elle est un principe « très difficile à comprendre ».
P donne de son existence une preuve qui restera classique. On constate, dit-il dans le Timée, que tous les corps sont le théâtre de transformations radicales et continues, de sorte qu’aucune nature ni qualité n’y demeure stable. Or, le changement exige, pour être intelligible et possible, un sujet dépouillé des formes passagères qu’il reçoit et manifeste. Il faut donc admettre l’existence d’un sujet universel qui, par lui-même, ne possède aucune forme, mais est capable de les prendre toutes.
La matière ainsi comprise est déjà cet élément proche du néant mais pourtant réel (cf. puissance pure chez Aristote). Elle a ici un double rôle essentiel d’être principe corruption dans les corps  et d’y multiplier à l’infini les perfections que les Idées réalisent pleinement dans leur incorruptible unité.

- Plotin
L’âme jouit d’une réelle perfection; elle doit par conséquent s’extérioriser par un effet mais tout en se dégradant : ce sera la matière.

a. dégradation
L’unité de l’âme est si fragile que, pour rester en deçà, la matière ne peut que réaliser la multiplicité pure. Et comme l’être et la perfection sont proportionnels à l’unité, la matière sera pur non-être dépouillé de toute détermination et perfection.

En conséquence :
1. Elle n’a rien de stable mais est pur devenir incapable d’exister en dehors du temps.

- l’école de Chartres
Pour résoudre l’opposition entre le concret et l’universel, Bernard et Thierry de Chartres font appel à 2 théories platoniciennes.
    1. Ils expliquent l’individualité au moyen de la matière, tirée du néant par un acte créateur de Dieu, mais qui existe à part comme une masse chaotique et désordonnée.
    2. Ils expliquent l’universel et ses caractères au moyen de l’Idée exemplaire, immuable et éternelle, présentant à l’Intelligence divine la perfection générique ou spécifique qui sera créée dans la matière et par suite, se multipliera dans les individus.

Reste à préciser de quelle façon se réalise cette union de l’Idée divine à la matière. Même si certains textes semblent affirmer qu’elle est immédiate (ce qui pourrait constituer une pente vers le panthéisme), est privilégiée la thèse qui distingue clairement dieu de ses œuvres et parle de « formes natives » comme d’intermédiaires crées à l’image des Idées divines auxquels ils participent, et destinés à mettre de l’ordre dans le chaos matériel.

2. À la matière avec la quantité : Saint Thomas
Une des définition les plus génériques du thomisme est celle du corps en général, objet de la physique ou philosophie naturelle:
Le corps est le composé substantiel de matière première et de forme substantielle, ces 2 éléments étant eux aussi réellement distincts et dans un rapport de puissance à acte.

3. Avec la forme : Saint Bonaventure

4. Elle est à l’haeccité : Duns Scot

5. Elle entraîne une distinction spécifique chez les êtres spirituels : Saint Thomas ; ou entre les atomes spirituels/monades : Leibniz

6. Elle est exclue par le monisme ou le panthéisme

II. Le pluralisme

1. Définition
« doctrine selon laquelle les êtres qui composent le monde sont multiples, individuels, indépendants et ne doivent pas être considérés comme de simples modes ou phénomènes d’une réalité unique et absolue » Lalande.

2. Postulat fondamental de Leibniz
L est résolument pluraliste et rejette fermement le monisme de Spinoza. Pour justifier sa position, son système lui défend de faire appel à l’évidence directe de l’expérience. Il se contente alors d’une preuve indirecte inspirée de la méthode de l’idée claire, preuve qui reste d’ailleurs implicite. On peut le résumer ainsi : le pluralisme est vrai parce qu’il peut entrer dans un système scientifique cohérent, à condition d’interpréter le réel par le double principe d’identité et de raison suffisante.

3. Défendu par le pragmatisme

4. Tendance pluraliste : les idéalistes anglo-saxons du 19°

5. Interprétation pluraliste de Bergson


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18 février 2009 3 18 /02 /février /2009 21:04

L'Individu, Réflexions sur la philosophie du sujet, Alain Renaut, compte rendu de lecture (en construction)

INTRODUCTION

Alain Renaut commence son ouvrage par un rappel de la longue histoire de la notion d’individu. Il retient deux exemples de cette histoire :
1. Dans l’Antiquité, Cicéron a donné le nom latin d’individuum aux corpuscules insécables qui composent dans la théorie de Démocrite et des épicuriens tous les corps qui constituent l’univers.
2. Au Moyen Age, cette notion a joué un grand rôle dans la querelle des universaux : pour Guillaume d’Occam notamment, il n’existe que des individus et l’universel n’a qu’une existence purement sémiotique et verbale.

Cependant il faut attendre la période moderne pour que la notion prenne tout son importance : seule la conception moderne du monde permet une pleine valorisation de l’individu. « (…) Sous bien des rapports, c’est à travers l’affirmation de l’individu comme principe et comme valeur (si l’on veut : l’individualisme) que le dispositif culturel, intellectuel et philosophique de la modernité se peut à la fois se caractériser dans sa plus certaine originalité et interroger dans quelques-unes de ses plus redoutables énigmes ». La raison essentielle en est l’appréhension spécifique de la liberté qui a émergé à la Renaissance et s’est développée avec le cartésianisme.

1. L’auteur par de l’idée qu’avec la modernité se met en place une nouvelle conception de la liberté. Hegel par exemple souligne bien la différence de nature entre la liberté des anciens et celle des modernes. Certes certains citoyens possédaient une réelle liberté : cette dernière se définissait de façon purement juridique. Mais « l’infinie exigence de la subjectivité, de l’autonomie de l’esprit en soi était inconnue aux Athéniens ». Dans le même sens, Heidegger estime que les modernes accèdent à une « nouvelle liberté » qui s’inscrit dans le « déploiement de l’Être en tant que subjectivité » et est liée à la « législation autonome de l’humanité ». « Dans la nouvelle liberté, l’humanité se veut assurée du déploiement autonome de toutes ses facultés pour exercer sa domination sur la Terre entière. »

Cette mise en relation et la prétention à une liberté conçue en terme d’autonomie sera interrogée de 2 façons :
- dans quelle mesure s’agit-il ici d’une « nouvelle liberté » qui engagerait une autre représentation de l’homme? Quelle facture s’est réalisée avec la conception précédente?
-est-il pertinent d’identifier l’autonomie à la « liberté des Modernes« ?

2. Naissance de l’humanisme et exigence d’autonomie

L’origine du terme d’autonomie est grecque. On le trouve chez Démocrite, Plutarque Sophocle Isocrate. Hérodote, Xénophon et Démosthène vont même jusqu’à confondre le terme de liberté (eleuthéria) et celui d’autonomie pour désigner la situation d’une cité qui ne serait pas soumise à une domination extérieure. Est-ce cependant suffisant pour contester la thèse classique selon laquelle est libre celui qui est doté des prérogatives du citoyen?
Certains au contraire ont pu concevoir que l’idée grecque d’autonomie s’appliquait non seulement à le cité mais aussi à des personnes, si bien que la problématique de la liberté de l’individu serait contenu dans la conception antique de la liberté politique. La logique interne de la culture grecque conduirait ainsi à la réalisation du processus démocratique. Il es facile de céder à la tentation de cette orientation continuiste lorsque l’on identifie « la manière dont les cités grecques ne cessaient de « remettre en question leur institution » et de « modifier les règles » de la vie en commun à l’ »émergence de l’autonomie »(Castoriadis, Débat, jv-mars 86) .» La question consiste là savoir s’il est question d’une redécouverte du sens authentique de la notion de liberté ou s’il s’agit simplement d’une illusion rétrospective. La tentative de l’auteur sera de « souligner dans quelle mesure les conditions précises exigées par la valorisation moderne de l’autonomie étaient encore fort loin d’être toutes remplies dans le cadre de la culture et de la philosophie grecques ».
L’auteur souligne d’abord le présupposé de la conception et de la valorisation de l’humanité comme « capacité d’autonomie, qui vont être constitutives de l’humanisme moderne et conduire (…) à l’affirmation de l’individu comme principe. La modernité se définit intrinsèquement par la manière dont l’homme se constitue comme « source de ses représentations et de ses actes, comme leur fondement (subjectum, sujet) ou encore comme leur auteur ». Ce n’est plus une instance extérieure (Dieu, nature des choses) qui impose ses normes à l’homme moderne qui au contraire fonde cer dernières à partir de sa raison et de sa volonté.
Par conséquent :
-le droit naturel moderne n’est plus de nature objective(trouvé dans un ordre immanent ou transcendant du monde) mais subjective(posé et défini par la raison ou volonté humaine)
-les sociétés modernes se trouvent auto-instituées et recourent pour ce faire au schéma contractualise. « l’homme n’a d’autre législateur que lui-même » Sartre.
Or la compréhension de la liberté comme autonomie n’est pas concevable dans le contexte qui a permis aux Grecs d’appréhender leur liberté : « le droit que possède les citoyens (…) d’exercer collectivement une part de la souveraineté se fonde en effet ici, non dans la reconnaissance du principe d’autonomie (…), mais dans l’organisation finalisée d’une nature au sein de laquelle « certains sont faits pour commander et d’autres pour obéir » »cf Aristote. Ce n’est donc pas la volonté humaine qui fonde la souveraineté. La volonté n’est jamais conçue comme capable de s’auto-déterminer.
Qui plus est, pour que le pouvoir de choix de la liberté des Modernes trouve une signification, il faut la concevoir dans le cadre d’un monde contingent ou même dans celui d’in monde en désordre. Or la cosmologie grecque se place dans un monde (« cosmo s ») régi par un ordre intangible. P. Aubenque : « la liberté de l’homme n’a pas partie liée à la contingence, mais au contraire elle s’y oppose »( La Prudence chez Aristote). Aristote compare en effet les hommes libres à des astres parce qu’ils n’agissent jamais au hasard et que leurs actions sont réglés. Par opposition, les actions des esclaves « sont rarement ordonnées au bien de l’ensemble, mais sont le plus souvent laissés au hasard. En d’autres termes, « ce sont les esclaves qui sont libres au sens moderne du terme, parce qu’ils ne savent pas ce qu’ils font, alors que la liberté de l’homme grecque et sa perfection se mesurent à la détermination plus ou moins grande de ses actions (Aubenque) ».
On voit donc clairement que la liberté grecque ne se conçoit pas selon le principe de l'autonomie mais bien au contraire selon celui de l'hétéronomie : quand bien même l'homme serait capable de créer un ordre nouveau, il faudrait que cette nouveauté puisse s'inscrire dans le cadre d'un monde appréhendé sous le mode d'un cosmos aux règles intangibles.

3. Autonomie et subjectivité (1° forme d'homogénéisation de la modernité)

Heidegger inscrit sous l'exigence d'autonomie le déroulement de la modernité : la philosophie moderne constitue pour lui une « métaphysique de la subjectivité qui s'est déployée en 4 étapes.

1. Descartes fait apparaître l'idée que la nature n'obéit pas à des forces obscures et invisibles, qu'elle est constituée d'une matière neutre, « maîtrisable par la raison (tout est susceptible d'être connu) et par la volonté (la totalité du réel est utilisable par l'homme visant la réalisation de ses propres fins) ». Cette vision anthropocentrique du monde constituerait l'essence de l'humanisme « pour laquelle tout devient moyen en vue de l'accomplissement de l'homme ».

3. Les Lumières réalisent une rupture avec l'idée cartésienne d'une physique a priori et impose à la rationalité scientifique une reconnaissance de ses limites, mais « la science continue d'apparaître comme un instrument neutre, mis au service des fins qui la dépassent et à partir desquels elle trouve sa valeur, qu'il s'agisse de l'émancipation ou du bonheur de l'humanité ».

4. Kant, à partir de la critique des morales du bonheur, effectue un virage décisif : la volonté morale se définit alors comme pure autonomie; à la fois agent et principe de la moralité,  elle se constitue comme objet d'elle-même et ne veut rien d'autre qu'elle-même. c'est elle qui pose la loi à laquelle elle accepte de se soumettre.

5. Nietzsche va alors radicaliser cette position en posant  la "volonté de puissance" par laquelle la volonté se veut elle-même. "le devenir-monde de cette figure ultime de l'humanisme moderne, par quoi s'achève le destin de l'idée d'autonomie, serait ainsi la technique, ou, si l'on préfère, cette raison purement instrumentale qui ne pose plus la question des fins et fait de la volonté (ou de la puissance) une fin en soi."

  « Le sens d'une telle déconstruction est limpide : la raison de Descartes et des Lumières n'aurait fait que conduire logiquement, par un mouvement de radicalisation, à cette volonté de la volonté où l'affirmation de l'homme comme sujet (fondement) trouverait son plus parfait accomplissement ; en ce sens, l'explication kantienne du principe d'autonomie ne ferait que s'inscrire au sein d'un unique et fatal parcours, s'achevant par l'essor triomphal d'une technoscience préoccupé exclusivement du renforcement continuel de son pouvoir, quel qu'en soi le prix. Force serait alors de convenir que c'est l'essence même du moderne, telle que l'exprime la vocationdu sujet à l'autonomie, qui se trouverait en jeu jusque dans les formes les plus aberrantes de la technicisation du monde : loin que l'on puisse dans ces conditions jouer une figure de la modernité contre une autre, tout conduirait bien plutôt au sacrifice global de la modernité et de ses valeurs, à commencer par celui de cette valeur de l'autonomie qui en exprime le mieux l'essence ».



4. Le paradigme individualiste (2° forme d'homogénéisation de la modernité)

La logique de la modernité a été interprétée de 2 façons :

  • comme une aliénation de l'individu à l'égard du collectif et du mode de production capitaliste

  • comme une émancipation de l'individu « vis-a-vis du poids des traditions et des hiérarchies naturelles »

La 1° interprétation s'est effondrée avec l'idéologie communiste. La seconde consiste à interpréter « l'histoire de la modernité, non plus à partir du développement du mode de production capitaliste, mais selon une dynamique d'émancipation de l'individu vis-à-vis du pods des traditions et des hiérarchies naturelles ». Cette interprétation consiste à « opposer aux sociétés traditionnelles celles où l'individu n'entend plus être soumis à nul autre que lui-même ».

La seconde a les faveur du présent. Cependant l'auteur reste méfiant à son égard : « il ma faut avouer que n'a cessé de croître en moi (…) l'inquiétude que [le paradigme individualiste] ne pût contribuer (…) à produire un nouvel aveuglement sur la complexité du moderne ». En effet, les analyses les plus récentes qui privilégient cette interprétation ont tendance à confondre les notios d'autonomie et d'indépendance, d'un côté, et celles de sujet et d'individu de l'autre. Ces différenciations ont certes une portée philosophique, mais elles ont surtout une portée pratique et politique. « Il [faut] reposer la question de savoir ce qu'il peut et doit en être d'une culture authentiquement démocratique (moderne). » Il s'agit ici de déterminer les principes et les valeurs d'une culture de ce type: comment le rapport de l'homme avec lui-même peut être producteur de normes et de lois?

  1. L’irruption de l’individu : la dynamique des sociétés démocratiques

    Alain Renaut estime que le chemin le plus court pour déterminer le prpre de la culture démocratique est de repartir de l’analyse tocquevillienne de la modernité. « Cette analyse (…) conduit à montrer comment la dynamique de la démocratisation se peut identifier de part en part à une affirmation de l’individu comme principe et comme valeur, affirmation qui définit ce que Tocqueville est l’un des premiers à nommer l’individualisme moderne», lequel se traduit par la révolte des individus contre la hiérarchie.

    1. Egalité contre hiérarchie
    Il y a ici une corrélation stricte entre l’individualisme avec le processus d’égalisation des conditions en quoi consiste pour Tocqueville la démocratie. Processus dont le symbole est la Déclaration des droits de l’homme et le point d’orgue, la nuit du 4 août 1789 où se virent abolis les privilèges, fondements d’une société d’ancien régime caractérisée par sa structure hiérarchique.
    L’analyse est d’autant plus pertinente et précieuse qu’elle permet de rendre compte de phénomènes historiques qui semblent aller à l’encontre de ce processus d’individualisation. Ainsi le socialisme et le communisme ont revendiqué une égalité réelle par opposition à une égalité purement juridique et formelle : cette critique de l’individualisme libéral est mu par la logique de l’individualisme moderne, marqué par le rejet de toute hiérarchie, même si elles sont ici nouvelles (créées par les inégalités sociales et économiques).

    2. Liberté contre tradition

    Une seconde composante de l’individualisme démocratique réside dans la tendance qu’a chaque individu à dénoncer la tradition au nom d’une certaine conception de la liberté.
    Les sociétés traditionnelles se caractérisent en effet par l’hétéronomie qui y règne : l’individu obéit à la tradition sans que ce dernier ne l’ait choisi et ne puisse la changer. « c’est sous la dépendance de cette tradition que se trouve constamment placée l’existence des personnes. » Or la Révolution constitue un ébranlement de cette conception : « héritée des théories du contrat social, elle consiste dans son principe à fonder la loi sur la volonté des hommes, et donc à la soustraire autant qu'il est possible à l'autorité des traditions. » En cela, elle manifeste la dynamique moderne de la démocratie et elle est l'effet de l'érosion progressive des contenus traditionnels de la société. Ici se trouve une des caractéristiques des sociétés modernes : l'affirmation de l'individualisme et le projet de l'individu de s'approprier les normes et de ne plus accepter de les recevoir conduisent à la dissolution continuelle des repères hérités du passé, ce qui engendre une « permanente révolution de ces repères ».

 

L'âge démocratique se caractérise par ces 2 thèmes de l'égalité contre la hiérarchie et de la liberté contre la tradition. « l'individu s'y affirme à la fois comme valeur et comme principe :

  • comme valeur, puisque dans la logique de l'égalité, un homme vaut un homme, ce pourquoi l'universalisation du droit de suffrage sera la traduction politique la plus complète d'une telle valeur;

  • comme principe, puisque dans la logique de la liberté, seul l'homme peut être lui-même source de ses normes et de ses lois, ce pourquoi, contre l'hétéronomie de la tradition, c'est sous le régime de l'autonomie que s'inscrira la normativité éthique, juridique et politique des Modernes ».

 

3. La culture comme problème

Le risque souligné par Tocqueville de la dynamique individualiste est l'atomisation du social : « ainsi la démocratie fait oublier à chacun ses aïeux, mais elle lui cache ses descendants et le sépare de ses contemporains; elle le ramène sans cesse vers lui seul et menace de le renfermer enfin tout entier dans la solitude de son propre coeur ».
En effet, le déploiement de la dynamique de l'égalité et de la liberté mine les principes (hiérarchie, tradition) du lien social ancien et conduit à une situation où l'individu se trouverait seul et sans résistance face à un « Etat tutélaire ».

II. La querelle française de l’individualisme : néo-tocquevilliens vs néo-heideggeriens

L’auteur se propose de rendre compte des débats récents soulevés par l’affirmation de l’individu comme valeur et comme principe. Il faut pour cela commencer par isoler les thèses en présences.

- pour les uns, le fait que la culture soit dorénavant subordonnée à l’immanence du sujet, i.e. ne trouve plus de « support que l’individu lui-même, constitue un immense progrès. L’émancipation de l’i dans un domaine jusque là régi par le principe d’autorité (la culture) serait la marque du progrès « particulièrement significatif » des sociétés contemporaines.
Dynamique individualiste = un processus d’émancipation connaturel de la modernité.

- pour les autres, au contraire, cette « culture de l’immanence » n’est rien d’autre qu’un « abaissement » de l’idée de culture qui ne serait plus qu’une des nombreuses formes de la consommation. La sphère de la culture et celle de la consommation se trouveraient toutes deux régies par le principe de plaisir et d’utilité, ce qui reviendrait à nier la spécificité de la 1°.
Dynamique individualiste = pseudo-émancipation ayant pour effet la destruction des valeurs humanistes, d’où son assimilation à une nouvelle forme de barbarie.

Pour rendre compte de ce débat, l’auteur va analyser L’Empire de l’éphémère de G. Lipovetsky, « ouvrage autour duquel cet affrontement de positions a trouvé à se cristalliser. »

1. La culture de l'individu : Gilles Lipovetsky

L’Empire de l’éphémère a pour objet la mode entendue dans son sens le plus large : elle désigne tout comportement inessentiel mais aussi « tout ce qui peut devenir objet d'un engouement soudain et passager, de la production culturelle à la vie politique ». Le point commun de tous ces phénomènes est qu'ils se prêtent à la médiatisation, la mise en slogan, à la consommation rapide et au renouvellement incessant.

Curieux objet d'étude tant il est vrai que la mode « semble bien être le lieu même de l'irrationnel et du contingent, de l'arbitraire et du gratuit, le lieu par excellence des comportements irraisonnés », ce qui défie toute logique. Si la philosophie et la sociologie ont vocation à « penser la rationalité du réel » et à « dévoiler une logique du champ social », alors la mode se pose comme un défi à la pensée. « Comment penser la rationalité du réel, ou la logique du social, là même où l'objet semble le plus proche du « sans raison »? »

La nature de cet objet fait qu'une explication tentante se présente immédiatement : l'irraisonné ne semble pas pouvoir être pensé en termes de choix libre et réfléchi, il obéirait à des « mécanismes préréflexifs où s'exprimeraient des logiques dissimulées aux acteurs »(conditionnements inconscients, orchestration souterraine par les impératifs de la consommation, puissance de la publicité, lois de rivalité sociale entre groupes concurrents). La société dominerait en fait l'individu : il y aurait une  « logique immanente des phénomènes socioculturels » qui s'imposerait aux acteurs sans qu'ils en soient conscients.


  1. La fondation philosophique de l’individualisme : l’époque des monadologies

    1. Le modèle monadologique

Pour Leibniz, seules existent des monades, i. e. des réalités individuelles ou individuées indépendantes les unes des autres, et ces réalités « n’ont point de fenêtres par lesquelles quelque chose y puisse entrer ou sortir. » Quelle va être la conséquence de cette conception pour le destin de l'idée de subjectivité?

Heidegger fait cette lecture. L'idée de subjectivité se trouverait inscrite dans l'attribution de la monade : elle serait capable de produire d'elle-même tout ce qui lui survient étant donné qu'elle reste close sur elle-même. « il serait donc tentant d'identifier cette constante autoproduction de soi à une dimension d'autonomie et de diagnostiquer, dans la monadologie leibnizienne, l'extension à toute réalité de ce qui chez Descartes par exemple, définissait la subjectivité du Moi humain ».

Cette lecture est cependant inexacte pour Alain Renaut. Le principal argument consiste dans l'ordre qui régit les relations intermonadiques, lequel n'est pas auto-institué par les monades, mais résulte de l'harmonie préétablie par Dieu. « En ce sens, la liberté leibnizienne (…) n'est donc nullement autonomie, soumission à une loi que l'on s'est soi-même donnée : elle est bien plutôt l'accomplissement par chaque monade de la loi constitutive de son être, auto-déploiement de sa déterminité propre et non pas auto-détermination ».




CONCLUSION

L'auteur termine par 3 remarques concernant l'idée du sujet « comme visée ou comme horizon de l'individu ».

  1. « Comment penser le sujet aujourd'hui, une fois dissipées les illusions suscitées aussi bien par sa construction que sa déconstruction? », voilà la question qui devrait structurer la réflexion philosophique. En effet, « l'exigence humaniste d'autonomie (…) garde en fait toute sa signification, certes contre les despotismes (…), mais aussi face aux dérives individualistes de nos sociétés démocratiques ». Il devient en effet nécessaire de trouver un moyen de limiter le culte de l'indépendance, or cette limite ne peut plus se déterminer que sous le mode de l'autonomie. Il faudrait alors que l'individualité s'élève à la subjectivité. « L'idée de sujet, précisément en tant qu'elle ne se réduit pas à celle de l'individu, mais implique au contraire une transcendance, un dépassement de l'individualité, comprend en elle l'intersubjectivité, donc la communication autour d'une sphère commune de principes et de valeurs ».

     

 


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17 février 2009 2 17 /02 /février /2009 08:35
Relativement au bonheur, aucun principe universellement valable ne peut être donné pour loi. Car aussi bien les circonstances que l'illusion pleine de contradictions et en outre sans cesse changeante où l'individu place son bonheur (personne ne peut lui prescrire où il doit le placer) font que tout principe ferme est impossible et en lui-même impropre à fonder une législation. La proposition : Salus publica suprema civitatis lex est (1) garde intacte sa valeur et son autorité, mais le salut public qu'il faut d'abord prendre en considération est précisément cette constitution légale qui garantit la liberté de chacun par des lois ; en quoi il demeure loisible à chacun de rechercher son bonheur dans la voie qui lui paraît la meilleure, pourvu seulement qu'il ne porte aucune atteinte à la liberté légale générale, par conséquent au droit des autres co-sujets.
KANT
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16 février 2009 1 16 /02 /février /2009 18:49
Je vous recommande cet ouvrage dont on peut trouver les premières pages à cette adresse : http://www.edilivre.com/doc/6044. La Condition des Grands de Kader Ben Mohamed, un livre décapant qui sort du prêt-à-penser ambiant.
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16 février 2009 1 16 /02 /février /2009 11:25

La connaissance du passé nous permet-elle de mieux comprendre le présent?

Une opinion commune prétend qu'il faut s'intéresser à l'histoire pour une bonne raison : la connaissance du passé nous permettrait de mieux comprendre le présent. En effet, tout se passe comme si la situation présente serait déterminée par la situation précédente, que la première dépendrait de la seconde. cela semble relever du bon sens : on comprend une chose quand on en connaît la cause. Trois remarques cependant.

1. si l'on est dans le domaine de la simple causalité, alors il s'agit d'expliquer et non plus de comprendre (saisir le sens) du présent par le passé. Une chose serait de trouver la cause d'un événement présent, autre chose serait d'en déterminer la signification.

2. quand bien même on pourrait reduire la compréhension du présent à son explication, on peut douter que la connaissance du passé serve à comprendre le présent. En effet, la sphère de l'action humaine n'échappe-t-elle pas à toute détermination, n'est-elle pas le champ de l'émergence du radicalement neuf et de la liberté?

3. dans ces conditions, si le présent est totalement neuf, l'explication est inadéquate et il faut alors faire un effort de compréhension. En quoi alors de quel recours la connaissance du passé peut-elle être? N'empêche-t-elle pas au contraire de saisir ce qu'il y a de radicalement neuf dans le présent?

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